Sentiments primaires

13.12.2016

Aujourd’hui, cela fait deux ans que tu es parti.
Voilà 2ans que tu as décidé de te pendre à cette poutre. Avec cette écharpe.
Voilà deux ans que tu as décidé de quitter ce monde.

Ma mer… Notre mère… oui je n’ai pas l’habitude.
Notre mère m’a dit ça toute à l’heure, au téléphone. D’un ton très neutre. Très distant. Sans aucune tristesse dans la voix. Comme si elle parlait d’une autre personne. Un voisin, un ami, ou du moins, quelqu’un de bien moins proche que son propre fils.

Je ne la comprend pas. Je ne comprend pas sa façon de gérer la douleur. S’y est-elle faite. A-t-elle déjà fait son deuil ? Je n’ai jamais eu l’impression que ça l’a affecté plus que ça. Enfin. Je ne l’ai jamais vu pleurer. Juste en parler de manière mélancolique.

Je ne suis pas venue à ton enterrement. Déjà, j’étais en pleine période d’examen, et puis… je n’y aurai pas trouvé ma place. Cette famille qui m’est presque inconnue. Qui ne m’accepte pas vraiment. A qui je ne suis qu’indiférence.

C’est bête. Tu as été le seul à faire un pas vers moi. On a passé quelques jours ensemble, chez toi, à jouer à la console. Tu disais que j’étais très belle, que tu aimais bien mon style. Mais… tu n’as plus donné suite après ça.

Une fois, tu m’avais promis de venir pour mon anniversaire. J’étais toute contente ! Enfin, quelqu’un venu spécialement pour mon anniversaire ! Enfin, une personne en plus de mes parents et moi ! Enfin, on me portait un peu d’intérêt !

Tu n’es pas venu…

Tu avais rencontré une nouvelle copine. Celle avec qui tu as eu un enfant. Celle que tu as trompé. Celle qui t’as quitté. Te laissant seul face à tes erreurs et ta dépression.

Ta mort ne m’a pas vraiment touchée. Enfin, son annonce m’a bien sûr choquée, mais je n’ai pas ressenti de tristesse. Après tout, je te connaissais à peine. Tu t’es intéressé à moi quelques jours, puis je suis retombée dans l’oubli…

J’ai juste ressenti un peu de regret. Celui de ne pas t’avoir connu plus. Celui de ne pas avoir pu t’aider dans ta dépression. J’aurai aimé que tu m’en parle. La dépression ça me connaît. Pas au point de faire des TS, comme toi, mais j’ai comme l’impression que j’aurai pu comprendre… Tenter de t’aider. Enfin. D’autres ont essayé. Amis, famille, psy,... tu ne voulais pas t’en sortir. Tu ne voulais pas voir l’aube de tes 40ans…

J’ai ce regret donc, de ne pas t’avoir connu plus. De ne pas avoir fait plus de pas vers toi. Mais je me dis aussi que tu n’en a pas fait beaucoup non plus… car tu t’es très vite désintéressé de moi.

Alors oui. J’aurai pu insister. Sauf que, quand on arrive dans une famille, un peu comme un cheveux sur la soupe, on s’attend à être accueilli les bras ouverts. Le plus naturellement du monde.

Ce n’était pas à moi de creuser ma place. C’était à vous, à toi, de m’intégrer !

Quand j’ai appris ta mort, je suis sortie dehors. Jai rencontré un rosier et j’ai cueilli une de ses fleurs. Ses pétales sont depuis dans un pot, en compagnie d’autres roses et éclats de rose. Figés par la mort…